Cap sur la Cour européenne des droits de l’homme pour les décrocheurs
Paris, 18 mai 2022. La Cour de cassation rejette les pourvois de 12 militant·es climat de Paris, Valence et Strasbourg condamné·es pour avoir décroché des portraits d’Emmanuel Macron. Elle estime que les condamnations par les cours d’appel sont justifiées et ne portent pas atteinte de façon disproportionnée à la liberté d’expression des activistes. Les décrocheurs et décrocheuses contestent cette décision et vont saisir la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH).
À la veille de la nomination d’un nouveau gouvernement, Action non-violente COP21 appelle à poursuivre la mobilisation face à un pouvoir exécutif qui reste sourd à l’alerte climatique.
La Cour de cassation a rejeté les pourvois de trois groupes d’activistes climat. Elle estime que les cours d’appel de Paris, Colmar et Grenoble ont eu raison de condamner les décrocheurs et décrocheuses de portrait présidentiels à des amendes avec sursis. Elle rejette l’idée que les poursuites étaient disproportionnées parce que les portraits n’ont pas été rendus, qu’ils ont une valeur symbolique et que les actions de décrochage étaient menées en groupe.
Me Ronald Maman, avocat aux conseils, réagit : « Les critères utilisés par la Cour de cassation pour rejeter le pourvoi des décrocheurs ne sont pas pertinents. La dimension symbolique du portrait et l’action en réunion sont intrinsèques à toute action politique de cette forme. Quant au défaut de restitution, il était indissociable du message politique des décrocheurs qui avaient annoncé les réquisitionner en attendant que le gouvernement respecte ses engagements climatiques. Nous demanderons à la CEDH de remettre en cause ces critères et de juger qu’aucune condamnation n’aurait dû être prononcée. »
Des actions qui contribuent au débat d’intérêt général
L’audience du 16 février 2022 à la Cour de cassation avait soulevé la nécessité d’établir des critères pour une meilleure homogénéité des décisions de justice vis-à-vis des décrocheur·ses de portraits. Dans la même période, la cour d’appel d’Amiens en janvier 2022, et celle de Toulouse le 27 avril, ont relaxé des décrocheurs. Elles rejoignent ainsi les nombreux tribunaux qui ont prononcé des relaxes sur le fond, au nom de l’état de nécessité ou de la liberté d’expression, tandis que d’autres ont condamné les décrocheur·ses, malgré des faits et des contextes identiques.
Me Paul Mathonnet, avocat aux conseils, explique : « Comme nous le lui demandions, la Cour de cassation confirme avec cette décision que la liberté d’expression peut justifier des actions militantes non-violentes quand elles relèvent de sujets d’intérêt général comme le dérèglement climatique. Les juges doivent vérifier que l’atteinte à la liberté d’expression qui résulte de la répression ne soit pas disproportionnée. Les pouvoirs publics devront désormais faire preuve de mesure et de prudence lorsqu’ils interpellent, répriment et jugent des militants. »
Cependant, elle aurait dû aller plus loin aux yeux des activistes climat. « Dans un contexte de criminalisation croissante des militants écologistes durant le précédent quinquennat, il est urgent que la justice reconnaisse le bénéfice démocratique des actions de désobéissance civile au regard de l’urgence climatique et de l’inaction des décideurs politiques. » ajoute Pauline Boyer, porte-parole d’ANV-COP21 et décrocheuse de portrait présidentiel.
Le risque d’un nouveau quinquennat perdu pour le climat
Les décrochages de portrait présidentiel dans les mairies ont commencé en février 2019 pour dénoncer le grave danger que l’inaction climatique du gouvernement d’Emmanuel Macron fait courir à la population. La suite a confirmé cette alerte, puisque la France a été condamnée à deux reprises et que le précédent gouvernement a été accusé de saboter les travaux de la Convention citoyenne pour le climat. Pendant ce temps, les impacts du dérèglement climatique font rage et les rapports scientifiques accablants se succèdent. Le dernier rapport du GIEC affirme que les solutions pour lutter contre le dérèglement existent, et dépendent de la volonté politique à les appliquer.
Pour Léa Chancelier, porte-parole d’ANV-COP21 Valence, « la nomination d’Elisabeth Borne comme Première ministre incarne la continuité avec le gouvernement précédent. Cela présage un nouveau quinquennat perdu pour le climat, alors que nous ne pouvons pas nous le permettre ! ».
Action non-violente COP21 appelle à maintenir la mobilisation pour le climat et la justice sociale, dans les urnes à l’occasion des élections législatives et sur le terrain.
De nouveaux procès auront lieu le 8 juin à Lyon, le 14 juin à Poitiers et le 21 juin à Toulouse.
Plus d’informations et de chiffres sur les décrochages de portraits présidentiels sur https://decrochons-macron.fr/
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- 18 mai 2022