Crédit photo : Benoit Derouet
Crédit photo : Benoit Derouet

Nos critères d’action non-violente

Processus d’Action non-violente COP21


L’action non-violente peut être à la fois juste et efficace, en s’inscrivant dans une démarche de changement radical tout en s’assurant du soutien de l’opinion publique et de la participation directe de la population. Parce qu’elle est basée sur la bienveillance, la sincérité et le respect des personnes, l’action non-violente permet de poser un conflit pour révéler une situation d’injustice, faire reconnaître la légitimité des interlocuteurs et des revendications, tout en créant les conditions du dialogue pour que ce conflit trouve une résolution constructive et positive. Cette approche permet ainsi d’agir non seulement sur les rapports de force, mais également sur les rapports de conscience.

La stratégie non-violente comprend de nombreuses formes d’action différentes, qu’il s’agisse d’actions symboliques ou d’actions directes d’interposition, d’actions constructives ou d’actions de non-coopération comme le boycott ou le retrait d’investissements toxiques. Ces formes d’actions permettent de faire participer la population dans toute sa diversité : femmes, hommes, jeune ou âgée, précaire ou aisée. Elles permettent à chacun de s’investir en fonction de sa disponibilité et de sa capacité à affronter ou pas la répression policière ou les risques juridiques.

La stratégie non-violente permet non seulement d’obtenir le soutien de l’opinion publique, mais se construit aussi avec la participation directe des citoyens. Un mouvement non-violent porte en lui même un autre type de société : une société basée sur la participation de tous et la diversité plutôt que sur des élites spécialisées (qu’il s’agisse d’experts scientifiques ou économiques, de représentants politiques, ou d’activistes chevronnés), une société basée sur une culture de non-violence, de bienveillance et de respect, une société basée sur la coopération plutôt que sur la compétition et la domination.

Nous nous proposons de nous engager collectivement dans une démarche non-violente dans la perspective de l’émergence d’un mouvement de masse pour relever le défi climatique dans les années à venir.


Critères concernant la non-violence

Les critères et consignes ci-dessous définissent l’état d’esprit et l’attitude que nous souhaitons adopter dans les actions non-violentes d’une manière générale. Il est envisageable de les assouplir si nous souhaitons concrétiser une idée action qui, sans respecter ces critères et ces consignes à la lettre, en respectent néanmoins l’esprit, et à la condition que cette dérogation soit décidée collectivement par le processus Action Non-Violente COP21.

Photo : Clément Tissot

Quelle attitude non-violente pendant l’action ? ↓

D’une manière générale, adopter une attitude respectueuse envers les personnes, y compris vis-à-vis des personnes qui s’opposent à nous, et même vis-à-vis des personnes qui utilisent la violence contre nous. Considérer les personnes comme des personnes humaines, même quand nous désapprouvons leurs actes. Distinguer les personnes et les actes (cela n’empêche pas de nommer les responsables et de dénoncer leurs actes, mais c’est différent d’une attaque personnelle). Ne pas considérer les personnes auxquelles nous sommes opposés comme des ennemis, mais comme des adversaires.

  • Pas d’agression physique de notre part envers les personnes : ne pas porter atteinte à l’intégrité physique des personnes (ne pas frapper, ne pas lancer de projectiles…). Notamment, ne pas répondre à la violence physique par la violence physique.
  • Pas de violence psychologique:
    • Pas d’agression verbale: pas d’insulte, de parole ironique qui pourrait être blessante, de propos méprisants, pas de moquerie ou de stigmatisation, pas d’attitude de rejet de l’autre. Ne pas crier sur les gens.
    • Pas d’agression non-verbale: pas de regard provocateur, pas de geste insultant…
    • Pas d’attitude menaçante envers les autres, pas d’incitation à la violence
  • Pas de dégradation matérielle
    • Dérogation possible, à la condition qu’elle soit décidée collectivement par notre groupe de préparation des actions : par exemple pour une action appelée à l’avance, menée à visage découvert et assumée publiquement (et dont on pense qu’elle paraîtra non-violente et légitime aux yeux de l’opinion publique).

Consignes à donner sur l’attitude non-violente à adopter pendant l’action ↓

  • Pas d’agression physique
  • Pas d’agression psychologique
    • Pas d’agression verbale
    • Pas d’agression non-verbale
    • Pas d’attitude menaçante ou d’incitation à la violence
  • Pas de dégradation matérielle non décidée collectivement à l’avance
  • Participer aux actions à visage découvert (pas de cagoule, de foulard, de lunettes de soleil ou de lunettes de ski qui masquent le visage, pas de masque « Anonymous», pas de masque à gaz…)
  • Ne pas avoir d’arme sur soi (barres de fer, projectiles, couteau… )
  • Éviter tout ce qui peut faire monter la tension (courir, crier, faire des gestes brusques…)
  • Possibilité d’avoir des pancartes à brandir pour verbaliser l’esprit de l’action
  • Lever les mains en l’air, paumes ouvertes, en signe de non-violence

Consignes en cas de confrontation avec les forces de l’ordre ↓

  • En cas de blocage ou d’encerclement par les forces de l’ordre :
  • Lever les mains en l’air
  • S’assoir
  • Brandir sa carte d’identité (peut être intéressant dans le cas d’interdiction d’une manifestation)
  • Reculer calmement et lentement en restant face aux forces de l’ordre
  • En cas d’arrestation sans résistance physique
  • Arrestation « digne » : marcher la tête haute en étant tenu par les policiers
  • Résistance passive en faisant le poids mort
  • Résistance physique non-violente en cas de délogeage
  • Par exemple pour maintenir un blocage humain : technique de la tortue. À réserver aux groupes expérimentés car l’utilisation de cette technique rend plus difficile une bonne maîtrise collective de l’attitude non-violente.
  • En cas d’agression par les forces de l’ordre
  • Charges, coups de matraque : s’asseoir. Exemple dans cette vidéo du mur humain organisé autour de Luis Goñi au Pays Basque Sud. Vers la fin de la vidéo, quand la police charge, les gens s’assoient : https://www.youtube.com/watch?v=TmRb0Nd3jxQ
  • Gaz lacrymogène : possibilité d’avoir dans ses affaires des tissus imbibés préparés à l’avance pour se protéger au moment de l’agression, mais éviter un équipement porté de manière préventive et visible à l’avance.
  • Flash-balls, grenades assourdissantes / défensive, canons à eau, et autres techniques de répression aux conséquences potentiellement plus graves :
    • Interpeler les policiers
    • Filmer
    • Avoir un comité habilité à prendre une décision pour la poursuite de la résistance non-violente ou le repli

Consignes en cas de perturbation par des personnes ou des groupes utilisant la violence dans le cadre de notre propre action ↓

  • Si possible avant la perturbation :Aller au-devant des personnes susceptibles de contrevenir aux règles que nous nous sommes définies collectivement, leur rappeler les règles de l’action telle qu’elle a été appelée, et tenter de les dissuader de perturber l’action
  • Possibilité de s’interposer de manière non-violente en levant les mains en l’air, ou en tendant les bras de manière horizontale
  • Pendant la perturbation :S’écarter d’eux. Vidéo : La police infiltrée dans les manifestations De Los Indignados à Barcelone le 15 Juin 2011: https://www.youtube.com/watch?v=U2BNzZzDq44
  • Faire un signe pour se dissocier d’eux : lever les mains en l’air

Moyens à mettre en place ↓

Diffusion des consignes :

  • Moyens possibles pour diffuser les consignes avant l’action :
  • Via un appel signifiant clairement le cadre non-violent des actions
  • Via des documents types flyer, mini-guide, manuel, etc.
  • Via des formations, et des briefings avant l’action
  • Moyens possibles pour diffuser les consignes pendant l’action :
  • Sur place, rappel des consignes par les peace-keepers si nécessaire
  • Omniprésence des consignes par des pancartes
  • Une ligne de com pour préparer et faciliter la communication par les activistes eux-mêmes sur le sujet de la violence / non-violence quand il sont filmés par les médias
  • Sur les réseaux sociaux, rappel des consignes pendant l’action
  • Point de vigilance : attention à distinguer plusieurs types de consignes et différents degrés de fermeté selon les cas de figure. Par exemple :
    • si quelqu’un casse une vitrine pendant un blocage non-violent : dénoncer le fait qu’il joue le rôle d’un provocateur policier
    • si quelqu’un perd son sang froid quand il est frappé par les policiers : lui rappeler l’esprit non-violent de l’action
    • lors du mur humain organisé autour d’Urtza Alkorta sur le pont d’Ondarroa au Pays Basque Sud (2013), des consignes étaient rappelées sur les réseaux sociaux : « Celui qui insulte, provoque ou menace la police n’est pas des nôtres et il devra être expulsé du mur humain !», « Il est signalé que toute personne faisant acte de violence dans le mur populaire sera considéré comme un policier infiltré et en sera expulsé »
  • Moyens possibles pour rappeler les consignes après l’action :
  • Formulations préparées à l’avance pour des Communiqués de Presse à diffuser après l’action pour clarifier les choses si l’action a été perturbée.

Moyens de contrôle médiatique ↓

  • Des vidéo-activistes pour avoir nos propres images.
  • Deux moyens pour éviter la destruction ou la rétention des images et permettre leur diffusion rapide (risque de saisie du matériel, saisie des données, immobilisation le temps de l’arrestation, etc.)Diffusion en live-streaming
  • Images prises depuis des points de vue inaccessibles (points en hauteur)
  • Consigne donnée en amont aux manifestants de venir avec des téléphones portables, appareils photo et caméras pour qu’on ait un maximum de prises d’images
  • Utiliser l’argumentaire de groupes de cop-watching sur le droit de filmer, pour répondre aux tentatives d’intimidation et de menaces des forces de l’ordre qui ordonnent d’arrêter de les filmer (distinction entre le droit de filmer / diffuser les images, et la possibilité de les donner à un tribunal)
  • Repérer les caméras de surveillance pour pouvoir dire que les arrachages de caméras sont illégaux et sont filmés
  • Des média-activistes présents sur les réseaux sociaux pour commenter l’action et la dissocier de toute perturbation et répression violente, en rappelant les critères selon lesquels l’action a été appelée

À préparer en amont : recrutement et formations ↓

  • Diffusion de documents à usage externe pour expliquer l’action non-violente, l’attitude non-violente, la stratégie non-violente, etc.
  • Formations :Formation de peace-keepers et de personnes ayant des rôles-clé dans l’encadrement de l’action
  • Formations ouvertes, organisées en amont, pour attirer de nouveaux activistes potentiels
  • Formation et briefing de masse juste avant l’action
  • Appel, préparation, et coordination des vidéo-activistes et des média-activistes
  • Constitution d’une Legal team
  • Constitution d’une équipe médicale
  • Constitution d’un service de sérénité et/ou service d’ordre
  • Évaluation des risques juridiques