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Menaces climatiques : défi pour la non-violence : Image à la une
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Menaces climatiques : défi pour la non-violence

La revue trimestrielle Alternatives non violentes donne des clés pour comprendre le fondement de la non-violence et des outils pour réfléchir sur son usage dans les luttes à travers le monde en croisant les regards de militants, d’universitaires et de chercheurs. Le numéro 183 attire l’attention sur les mobilisations contre le dérèglement climatique, dont celles d’Alternatiba et d’ANV-COP21.

Menaces climatiques : défi pour la non-violence
Couverture d’Alternatives non-violentes n°183

La non-violence dans la gestion des conflits exacerbés par le dérèglement climatique

Le changement climatique n’induit pas seulement des préoccupations écologiques et humanitaires. Ses répercussions sont aussi géopolitiques, avec des projections inquiétantes. Selon le Groupe d’experts intergouvernementaux sur l’évolution du climat (Giec), la hausse probable de la température moyenne du globe durant ce siècle risque de modifier l’accès aux ressources et d’accroître les déplacements forcés, deux facteurs de tensions et d’affrontements. Ce lien a déjà été établi en Syrie, où les sécheresses des années 2000 ont entraîné un exode rural qui a ébranlé le pays.

Observant que les politiques nationales de défense restent inadaptées face à ces crises liées au dérèglement climatique, qu’elles contribuent d’ailleurs à alimenter en recourant à des véhicules militaires gourmands en carburant, le Mouvement pour une Alternative Non-violente (MAN) plaide en faveur de la mise en œuvre d’outils et de programmes de prévention et de régulation des conflits sans usage de la force.

Parmi eux, figure l’intervention civile de paix, apparue dans les années 1980 en tant qu’alternative aux négociations diplomatiques et aux opérations militaires pour éviter ou faire cesser des hostilités. Les médiateurs impartiaux et non armés qui la composent, engagés sous le mandat d’une organisation tierce, n’ont pas vocation à imposer une décision extérieure, mais à faciliter le dialogue entre les parties prenantes pour qu’elles parviennent à une solution durable et favorable à toutes. L’ONG Nonviolent Peaceforce travaille dans ce sens à résorber le conflit qui entoure le projet de construction d’un pipeline à travers la réserve sioux de Standing Rock, aux Etats-Unis, en raison des menaces de fuite qui pourraient empoisonner l’écosystème, dont des sites considérés comme sacrés par les Indiens.

La non-violence comme moyen de pression sur l’industrie fossile

L’accord de Paris adopté à l’issue de la COP 21 ouvre la possibilité d’engager des poursuites devant les juridictions nationales en cas de manquement des Etats à leurs obligations climatiques. Il implique ainsi la société civile dans un processus de vigilance face aux atteintes commises par les pouvoirs publics.

Cette vigilance doit également s’exercer à l’égard des groupes du secteur pétrolier et gazier. Néanmoins, comme ces derniers sont enfermés dans la logique lucrative de leur principale activité, l’exploitation de gisements, ils ne peuvent être à l’origine d’une transition énergétique. Par leur importance économique et leur lobbying politique, ils constituent même un frein. Partant de ce constat, la campagne internationale « fossile free » (« zéro fossile » en français) lancée par 350.org vise à faire pression non sur ces firmes mais sur les institutions qui collaborent avec elles, en recourant notamment à des initiatives non-violentes et créatives pour maximiser l’impact médiatique.

Par exemple, pour dénoncer le soutien financier de Total au musée du Louvre, une marée noire symbolique a été organisée aux pieds de La victoire de Samothrace, sculpture grecque qui figure la proue d’un bateau. Cette orientation stratégique est complémentaire aux actions de désobéissance civile qui cherchent à empêcher directement l’extraction ou le transport des hydrocarbures par des blocages ou des sabotages, en prenant soin d’éviter toute confrontation physique. Elles peuvent impliquer des milliers de personnes pour donner une visibilité accrue à la résistance et réduire les risques juridiques encourus pour les participants.

La non-violence comme vecteur d’un changement d’échelle du mouvement climatique

L’ampleur et l’urgence du défi climatique imposent une transformation radicale et rapide de nos modes de vie et de développement. Pour y parvenir, seule une stratégie permettant d’emporter l’adhésion de la majorité et d’accélérer les débats est viable. L’action non-violente permet à ce titre d’affirmer une résistance, de susciter l’audace et d’attirer des militants, tout en en demeurant suffisamment pragmatique et proche des réalités de la population pour l’intéresser à la cause défendue. Comme l’évolution de la société vis à-vis du climat requiert d’atteindre une masse critique, un changement d’échelle est indispensable.

Les actions d’Alternatiba, né lors d’un Village des Alternatives à Bayonne en 2013 s’inscrivent dans un stratégie de lutte non-violente. En 4 ans, plus de 130 villages ont eu lieu en Europe et au delà, des Tours à vélos pour mettre en lumière des alternatives locales, des campagnes pour faire changer d’échelle les alternatives et faire du plaidoyer local ont fleuri partout sur les territoires. Ces actions ont l’avantage d’être concrètes et de s’intégrer facilement dans la vie quotidienne des gens. Elles permettent donc de mobiliser largement, y compris le grand public. La non-violence permet à chacun de trouver sa place dans le mouvement. La fusion avec ANV-COP21 en 2017 a constitué une nouvelle étape, en liant les stratégies complémentaires des deux entités, pour un mouvement qui marche sur deux jambes : celle de porter des alternatives écologiques et solidaires et celle de manifester une résistance aux projets fortement émetteurs de gaz à effet de serre (GES), dit ‘climaticides’.

Notre marge de manoeuvre pour enrayer les émissions de GES se resserre de jour en jour. L’enjeu est de faire changer d’échelle le mouvement pour atteindre un seuil de masse critique, nécessaire pour avoir une capacité de contrainte envers les décideurs politique pour faire changer le système, pas le climat ! Le changement doit opérer à tous les niveaux en intégrant le défi social au défi climatique.

C’est en bien en construisant des passerelles entre les luttes qu’il sera possible, ensemble, d’avancer et de relever le plus grand défi auquel l’humanité doit faire face depuis ses débuts.

Vous trouverez plus de détails sur ce point (et sur le reste) dans le numéro, disponible sur le site de la revue : http://alternatives-non-violentes.org/

  • 19 février 2018